L’instabilité latérale chronique de la cheville
Les entorses à répétition de la cheville, les accidents d’instabilité, l’existence d’une appréhension lors de la marche en terrains irréguliers, le sentiment d’avoir une cheville « pas sûre », de perdre confiance, de limiter progressivement ses activités pour éviter les « entorses », etc sont un motif très fréquent de consultation chez le chirurgien spécialiste de la cheville.
Nous allons donc aborder ce problème de la manière la plus claire et compréhensible. Mais avant d’aborder le problème de l’instabilité, nous allons expliquer quels sont les éléments qui permettent à une cheville normale d’être stable..

LES FACTEURS DE LA STABILITÉ DE LA CHEVILLE NORMALE

Quelles sont les causes de l’arthrose de la cheville ?
I/ Les facteurs « passifs » de la stabilité (c’est-à-dire, notamment, ceux qui ne seront pas améliorés par une rééducation fonctionnelle par kinésithérapeute)
1°)Les éléments osseu
a) La congruence des pièces osseuses (« elles s’épousent », elles sont encastrées)
La partie distale du tibia, avec la malléole médiale, et la partie distale de la fibula (malléole latérale) constituent la « pince bi-malléolaire ». Dans cette pince, est naturellement « stabilisé » le dôme du talus (anciennement appelé astragale). Cette « congruence » explique le premier élément de la stabilité de la cheville normale.
b) L’axe anatomique de la cheville
Dans la cheville « normale », le point d’appui du talon se projette légèrement en dehors de l’axe du tibia. Ceci est un élément supplémentaire favorisant la stabilité de la cheville. Cet élément devra toujours être recherché dans la mise au point de la pathologie et de ses causes.
Pièce anatomique montrant le point d’appui du talon normalement positionné en dehors du prolongement de l’axe du tibia
Image radiologique normale montrant un axe normal, compris entre 5° et 10°
Image radiologique pathologique montrant un axe à 1°, en dehors de la fourchette normale
Si la cheville doit être stable, elle doit également être mobile, pour assurer une propulsion normale mais également un amortissement efficace: mobile et stable, tel est le challenge.
2°) Le système ligamentaire
Deuxième élément « passif » de stabilité : les haubans, le système ligamentaire, qui doit être sain et équilibré.
Ceci illustre l’intérêt crucial d’un bilan radiographique en charge, c’est-à-dire en position debout, comme préambule à toute démarche diagnostique et thérapeutique. Cet examen, simple, peu coûteux, très accessible est le seul examen qui soit réalisé dans la position de fonction de la cheville : la position debout. Une multitude de renseignements seront recueillis par votre spécialiste, comme les pincements articulaires, les bâillements articulaires, les déséquilibres ligamentaires, les troubles d’axes, etc
Image radiologique pathologique montrant une perte de l’axe normal et des lésions d’arthrose due à la répétition des entorses
II/ Les facteurs « actifs » de la stabilité
Il s’agit du système tendino-musculaire dont l’acteur principal de stabilisation de la cheville est représenté par les court et long fibulaires, dont les tendons contournent la malléole par derrière et par dessous.
Image montrant le trajet des tendons fibulaires (« peroneal tendons »)
Il existe des instabilités fonctionnelles, sans lésions ligamentaires associées. Ceci signifie que certaines personnes ont des chevilles « instables », des chevilles qui lâchent, des entorses à répétition, alors que leurs ligaments sont sains.
Ces instabilités fonctionnelles doivent toujours être recherchées, car leur traitement diffère : c’est la rééducation fonctionnelle proprioceptive qui dans la majorité des cas permettra de stabiliser la cheville de ces patients, et non une chirurgie ligamentaire « sur ligaments sains » ! Nous aborderons plus loin dans cet article les défis relevés par les kinésithérapeutes-rééducateurs, ainsi que de nouveaux outils « connectés » qui autorisent de nouvelles méthodes de rééducation, avec des méthodes de mesure objectives permettant le contrôle de la progression du patient dans les exercices proposés. Dans certains cas au contraire, nous devons parfois faire le constat de l’échec de la rééducation, notamment quand la réalisation des exercices provoque des douleurs qui rendent inefficace la rééducation.
Illustration peropératoire d’une fissuration d’un tendon fibulaire responsable d’une instabilité d’origine fonctionnelle
Après cette introduction sur la cheville stable et sur les différents éléments qui assurent cette stabilité, nous comprenons plus aisément pourquoi une cheville instable n’est pas l’autre, et qu’une identification de la cause ou des causes de l’instabilité est une étape indispensable dans l’orientation du traitement.

LE DIAGNOSTIC DE L’INSTABILITE

Quelles sont les manifestations de l’arthrose de la cheville ?
1/LA CLINIQUE
1°) L’interrogatoire :
la notion d’instabilité est une notion qui ne peut être relevée qu’à l’interrogatoire : il s’agit d’un symptôme. Sa définition regroupe un éventail de plaintes de gravités variables. Il peut s’agir d’une appréhension (le patient ne sent pas sa cheville stable, solide, sûre, il s’en méfie, il craint qu’elle « lâche »). Parfois, il s’agit d’épisodes de dérobements très brefs, pas forcément suivis de douleurs, parfois uniquement en terrains irréguliers, chemins en dévers, mais également caillou sur un trottoir, bordure du trottoir. Cette notion peut également se traduire par de véritables entorses qui se répètent. Ceci peut conduire à l’arrêt du sport (sports collectifs, sports de raquettes) ou à une adaptation de l’activité sportive ;
la douleur est parfois un motif de consultation : elle pourra être occasionnelle et ne survenir qu’à l’occasion des « entorses « ou « accidents d’instabilité », pourra récidiver à la pratique sportive ou même être présente lors de la pratique des simples activités quotidiennes. Une cause sera toujours recherchée, articulaire, ligamentaire, tendineuse, etc.
2°) L’examen clinique :
Il est indispensable ! Aucun examen complémentaire ne pourra remplacer un bon examen clinique « programmé », c’est-à-dire qu’il va suivre une ligne de conduite intangible : observation, palpation, testings passifs et actifs, éléments articulaires et des structures musculo-tendineuses, recherche des laxités ligamentaires.
Ces deux premiers éléments, interrogatoire et examen clinique, conduisent le plus souvent à un diagnostic précis. Le rôle des examens complémentaires sera de confirmer telle ou telle suspicion ou de préciser l’origine d’un problème mis en évidence.
2/LES EXAMENS PARACLINIQUES
1°) Le bilan radiographique : l’examen indispensable, il est le seul à pouvoir être réalisé en position debout. Il s’attache à mettre en évidence un trouble d’axe de l’arrière-pied (souvent le talon « trop en dedans ») ou une anomalie de la statique du pied, mais également la présence d’arrachements des points d’attache des ligaments, de lésions du cartilage, etc.
2°) L’échographie : entre les mains d’un échographiste spécialisé, c’est l’examen le plus sensible et spécifique : la sonde d’échographie va pouvoir explorer de manière très fiable les ligaments de la cheville mais également les tendons fibulaires, structures qui sont juste sous la peau. En plus, c’est un examen qui peut être réalisé en dynamique (le radiologue peut « tordre » la cheville et observer les structures ligamentaires qui se tendent… ou pas.
3°) L’arthroscanner est le seul examen qui permet une exploration des lésions du cartilage. C’est un examen préopératoire souvent indispensable.
Scanner montrant des lésions d’arthrose évoluée (contact direct entre les os)
4°) L’IRM ne donne pas de renseignements directs sur le cartilage, et par ailleurs, si les conditions d’examen ne sont pas parfaites (choix des plans de coupes), les ligaments ne seront pas correctement explorés.
5°) L’EOS des membres inférieurs est parfois demandé en complément pour mesurer des anomalies de l’axe global des membres inférieurs.
LES TRAITEMENTS: LA STRATEGIE

Quelles sont les manifestations de l’arthrose de la cheville ?
1°) Le traitement conservateur: la rééducation fonctionnelle proprioceptive, chez le kinésithérapeute
IL EST INDISPENSABLE AVANT toute discussion de traitement chirurgical d’une instabilité de cheville. Il est basé sur la rééducation fonctionnelle proprioceptive, qui vise à optimiser la programmation neuro-musculaire. Diverses méthodes existent, certaines anciennes, d’autres plus innovantes et spécifiques de la rééducation de la cheville.
En cas de varus calcanéen (le talon qui rentre vers l’intérieur), des semelles orthopédiques compensatrices pourront être proposées comme adjuvant.
2°) Les traitements chirurgicaux :
S’il existe une technique qui est la plus répandue dans le monde, le « Bröstrom-Gould » (cf cours du Dr GRISARD: Revue de littérature Ligamento cheville chaîne U-tube),
d’autres techniques ont la cote, dont celle du rétinaculum des extenseurs (cf vidéo U-tube: Ligamentoplastie au rétinaculum des extenseurs), qui a le mérite de stabiliser l’étage du dessous, souvent atteint dans les instabilités latérales chroniques anciennes.
Ces techniques sont réalisées à ciel ouvert.
Des équivalents existent par technique arthroscopique, mais sont en cours d’évaluation sur le plan des résultats (voir le cours du Docteur Jean-Luc GRISARD sur la chaine U-tube de l’académie de la cheville)
En pratique, le choix de tel ou tel technique va se faire au cas par cas : nous ne proposerons pas à la jeune fille un peu hyperlaxe qui pratique un sport en salle la même technique qu’au judoka de 100 kg qui pratique en compétition : la demande n’est pas la même, les besoins ne sont pas équivalents, la technique chirurgicale sera adaptée, personnalisée.

JE VAIS ETRE (JE SUIS) OPERE: comment ça se passe?

Quelles sont les manifestations de l’arthrose de la cheville ?
Je vais être opéré(e) d’une ligamentoplastie de la cheville… Je me pose des questions…
Docteur Jean-Luc Grisard
Avant mon opération
Le rendez-vous avec le médecin-anesthésiste : il est obligatoire. En dehors de l’urgence chirurgicale, vous devrez rencontrer le médecin-anesthésiste entre 48 heures et 30 jours avant l’intervention. C’est lors de cette consultation que la technique d’anesthésie sera décidée, en fonction des contraintes de l’intervention, de vos préférences, mais également de votre état de santé et de vos facteurs de risques.
Mon hospitalisation
Mon entrée (admission) : sauf éloignement géographique ou autres contraintes, l’admission a lieu le jour même.
La préparation cutanée :
- L’enlèvement des poils est fortement déconseillé par le Comité de Prévention du Risque Infectieux de la Clinique du Parc (Président : Docteur Jean-Luc Grisard) : en effet, il a été montré que l’enlèvement des poils augmente le risque d’infection du site opératoire ! Les patientes pourront se faire épiler au minimum 1 semaine avant l’intervention, mais jamais de rasage (micro-coupures qui vont être colonisées par des bactéries qui augmenteront le risque d’infection postopératoire) ;
- La douche préopératoire au savon doux non parfumé (savon de Marseille, Sanex, etc) sera prise la veille et le matin de l’intervention, cheveux compris. La Bétadine et autres antiseptiques ont été abandonnés à la Clinique du Parc, que ce soit lors de la préparation cutanée (douche), ou pour les pansements postopératoires. La raison en est simple: notre peau est recouverte d’une flore bactérienne « résidente » qui aide la cicatrisation. Utiliser des antiseptiques est donc nocif, en éliminant cette flore.
- Enlever le vernis à ongle, véritable bouillon de culture de bactéries
- Enlever bagues, boucles d’oreilles et autres piercing, qui constituent des niches pour les bactéries
Durée de l’hospitalisation : soit une nuit d’hospitalisation, soit hospitalisation ambulatoire
L’intervention :
La technique la plus employée dans le service est la technique au rétinaculum des extenseurs : elle comprend à la fois une réparation des ligaments déficients et un renfort au rétinaculum. https://youtu.be/T8U2d0D5_V4
L’immobilisation par botte amovible : elle protège les gestes de réparation qui ont été réalisés, elle favorise une bonne cicatrisation (en empêchant les tractions et tiraillements sur la peau), elle permet de prévenir un enraidissement « en équin » de la cheville pendant la période où l’appui est interdit (en principe, deux semaines).
La botte amovible doit être conservée 24 heures sur 24 pendant les 4 premières semaines postopératoires : le pansement ne sera pas refait pour ne pas perturber la cicatrisation ; par ailleurs, sortir le pied de la botte est à l’origine de tractions sur la peau préjudiciables à une bonne cicatrisation. Les fils seront enlevés 15 jours environ après l’intervention
Les douleurs postopératoires : dans la plupart des cas, elles sont modérées. Le ressenti des douleurs est influencé par des caractéristiques personnelles, par l’état psychique (le moral), par les douleurs préopératoires (effet mémoire), par les traitements que vous prenez habituellement. La prise en charge de la douleur se fait conformément à des procédures définies par le CLUD (Comité de Lutte contre la Douleur) de la Clinique du Parc.
L’autonomie :
Un kinésithérapeute passera dans ma chambre pour m’apprendre à me servir des béquilles, et à reprendre un appui, qui est autorisé dès la sortie de la clinique ; il me donnera des indications sur les mouvements d’auto-rééducation que je devrai effectuer dans la botte très régulièrement jusqu’à la fin de l’immobilisation.
DONC, la reprise de la marche en appui complet est autorisée et encouragée dès le jour de l’intervention: au début, des béquilles sont indispensables pour reprendre son équilibre, pour modérer les douleurs, pour aider à vaincre son appréhension, mais progressivement, les jours passant, l’appui augmente, et une voire la deuxième béquille est (sont) abandonnée(s).
Mon départ de la clinique
Les départs ont lieu d’ordinaire soit le jour-même de l’intervention si une chirurgie ambulatoire a été prévue, soit en fin de matinée du lendemain de l’intervention.
Le bon de transport me sera délivré par le secrétariat à ma demande.
Une fois rentré( e) chez moi
Les antalgiques : sauf intolérance, contre-indications, allergies ou interactions médicamenteuses, me sera remise une ordonnance d’antalgiques comprenant des médicaments de première intention (pallier 1) à prendre systématiquement pendant les 5 jours qui suivront la sortie (douleurs ou pas : il s’agit d’empêcher les douleurs de survenir et de s’installer. En plus de ces médicaments à prendre en systématique, des antalgiques de seconde intention, à prendre en plus des médicaments de pallier 1 si ces derniers ne suffisent pas.
Le traitement anti-coagulant : sa durée est de 30 à 45 jours selon les facteurs de risques associés (antécédents de phlébite, surpoids ou obésité, etc). Il s’agit d’un traitement par injection sous-cutanée, que la plupart des patients apprennent à se faire eux-mêmes.
L’immobilisation par botte amovible:
La botte amovible : 24 heures sur 24 pendant 6 semaines hors séances d’auto-rééducation.
Semaines 1et 2 | J15 | Semaines 3 et 4 | Semaines 5 et 6 | Semaines 7 à 12 | |
BOTTE | FILS | BOTTE | BOTTE | Marche sans protection | |
24/24 | 24/24 | 24/24 | 24/24 | ||
AUTOKINE | |||||
APPUI | AUTORISE | DES | LE JOUR | DE | L’INTERVENTION |
Le repos : surélever le pied au niveau du cœur est essentiel pendant les 10 premiers jours : en luttant contre le gonflement, on lutte contre la douleur, on favorise une bonne cicatrisation, on fait le lit d’une récupération rapide
La rééducation : elle commence au 28° jour postopératoire. A ce stade, je commencerai seul(e), sans l’aide d’un kinésithérapeute : 1 fois par jour, je sors le pied de ma botte et j’effectue des mouvements de la cheville de flexion-extension, dans l’axe, sans torsion. Cette sortie quotidienne de la botte est l’occasion de prendre une douche.
L’entrée en scène du kinésithérapeute : à la 7° semaine postopératoire. Une ordonnance m’aura été remise dès l’hospitalisation, pour que je puisse prendre contact à l’avance avec le (la) kinésithérapeute qui me prendra en charge
Mon autonomie
Vais-je pouvoir appuyer mon pied au sol ? Vais-je avoir besoin de béquilles ? Combien de temps ?
Oui, béquilles obligatoires jusqu’au premier rendez-vous. Ensuite, un appui progressivement total limité par les seules douleurs est recommandé. L’appui prévient la « déprogrammation neuro-musculaire », favorisera la récupération de la mobilité de la cheville, diminue le risque de phlébite, entretient le système musculaire. Mais il ne s’agit pas d’aller se promener : il faut limiter le temps passé en position debout (toujours ce problème de gonflement contre lequel il faut lutter, pendant plusieurs semaines).
Et ensuite ?
L’arrêt de travail : de 6 semaines à 3-4 mois selon l’activité professionnelle
La rééducation, le masseur-kinésithérapeute : 30 séances sont prescrites d’emblée.
La conduite automobile sera reprise vers le terme de la 6° semaine, après le sevrage de la botte.
La reprise de mes activités de loisirs, la reprise du sport
Marche, vélo, natation : 6 semaines
Course à pied : 3 mois
Sports « raquette » : 4 mois
Sports collectifs, qui impliquent des pivots (changements de direction) et des contacts: 6 mois
Traitements
La prise en charge initiale et adéquate d’un traumatisme, qui va de la « simple » entorse à la fracture, simple ou complexe, est un élément fondamental : c’est donc de prévention de l’arthrose qu’il s’agit. Si malgré tout elle survient, il existe un arsenal de techniques de prise en charge :
Consultez les traitements possibles de l’arthrose de la cheville